François
Pagé
« François Pagé cultive ses jardins…
»
Le plaisir est dans la séduction et la nature
séduit les âmes saturniennes par ses
décors, ses arômes encensoirs, son essence
incantatoire. Métamorphosée dans l’esprit
du peintre qui se la réapproprie à ses
propres ardeurs, elle revêt chez François
Pagé l’apanage d’une femme dont
les lettres du prénom symbolisent un univers
fantasmagorique orné de mille tonalités
parfumées…Et à chaque prénom,
une dimension picturale jaillit de l’œuvre,
telle une mise en scène romantique à
travers laquelle quelques songes ineffables évoluent
de façon altière et cernent de lyrisme
gestuel et de poésie coloriste le support qui
n’a nul mot à dire, se contentant seulement
de se laisser surprendre, recouvrir et griser de désirs
matiéristes. Une aura translucide traverse
parfois le théâtre de ces jardins à
l’anglaise pour irradier en ciel d’opale
à l’arrière plan des compositions.
Le peintre s’abreuve aux fontaines de Jouvence
et le jour ne décline jamais dans ses œuvres.
D’une bribe de nature morte, comme celles jadis
si prisées par les Maîtres de la peinture
de genre, il en ressort ici un jeu de cache-cache
anachronique de styles défiant les canons esthétiques
et l’horloge de Chronos. François Pagé
cultive ses jardins, comme un philosophe des Lumières
il les souligne d’une réflexion aussi
mesurée que la main qui les peint.
Lièvre en faïence trônant au centre,
faisant au bord de la pièce, silhouette en
mouvement traversant l’œuvre, est-ce le
sceau d’un vécu se mêlant aux chimères
des muses ou l’estampille de penchants intimistes
qui interpellent l’œil puis s’évanouissent
dans le dédale imaginaire d’un jardin
dont l’artiste nous livre un fragment par touches
et rayons coloristes élaborés ? Avec
le sourire, l’artiste se confessera peut-être,
sinon le spectateur jouira de toute sa liberté
pour imaginer à sa guise ce que l’œuvre
lui suscite émotionnellement et mentalement
et peut-être y rencontrera-t-il la légende
personnelle du peintre ?...
François Pagé cultive ses jardins comme
un poète matiériste savant, usant de
l’enseignement passéiste au profit d’une
conscience avant-gardiste. Les formes parfois oblongues,
parfois circonvolues qu’il dépose sur
ses toiles coulent de source et les couleurs arpentent
des allures de météores incandescentes
croisant le fer avec la douceur de nues diaphanes
gonflées de songes, offrant ainsi au regard
une poétique ornementale et une dialectique
des sens…
Virginie Gauthier, février 2007
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